La vision du monde intérieur est grandiose quand on sait par quelle porte entrer. Se déploie devant nous des formes, des mouvements et couleurs dans un nombre infini. L’évolution de l’esprit et la conscience, change ce paysage de jour en jour. La géométrie, avant de passer à travers les mains, puis sur la surface à peindre est expérimentée à l’intérieur du corps-même. L’attrait de la forme, des volumes, de la perfection de toutes les figures géométriques n’est pas toujours suffisant pour pouvoir produire l’image dans la réalité. L’expérience de peindre la forme vient de chaque cellule, la forme doit être comprise dans son existence, dans sa création même et intégrée pour révéler toute sa puissance. Bien sûr je pourrais reproduire, décalquer, imprimer, copier/coller un dodécaèdre ou un triangle mais ne manquerait-il pas une partie de son sens. La conscience œuvre à la reliance et la compréhension des éléments du monde à travers l’art. Le visionnaire, la visionnaire ouvre avec force son chemin personnel à la vue de l’autre dans cette absolue nécessité de vivre l’intensité de pouvoir enfin dire « je sais, je suis, voilà l’étendu du visible, de l’invisible, de l’expérimentable». Chaque humain à cette immense tâche, celle de trouver comment être, lui-même. Le visionnaire passe par un processus complexe d’ouverture à l’autre, il est nu devant tous, devant ceux qui marchent encore masqués. Autoriser la vision, autoriser l’expansion, s’autoriser à enfin avouer que tout est possible. Transmettre sa propre lecture cellulaire, la lecture sans concession, des sentiments, des émotions, du corps, des comportements psychiques et énergétiques. Accepter que chaque élément vient nourrir ou bouleverser ce qui crée la vision : l’ensemble des structures de l’homme, l’âme, la conscience, l’esprit et le corps. Transmettre l’essence de ses pupilles. Sans chercher le sens de la vision on reçoit l’information qui y est lié, une autre forme géométrique, peut-être un peu grise, dorée ou bleu.
Aujourd’hui, dans la nuit du 12 au 13 juin 2021, les sphères et les cubes sont mes principales formes. Je sens bien d’autres volumes à base triangulaire arriver dans mes images peintes. Elles deviendront de plus en plus solides jusqu’à être visibles. De la même manière que la lumière condensée forme la matière. Je ne peux pas reproduire, je ne sais pas le faire, peindre est bien incarner la forme. Sans cette incarnation, cet engagement complet, la vision n’a pas lieu, la peinture est à demi. Il n’y a, pour moi, aucune autre tâche que de comprendre et intégrer les formes primaires, impalpables et presque visibles de la vie. Cette activité n’est pas petite ; elle se développe sous de nombreux aspects, car certaines forme-informations sont des émotions, des souvenirs, des sentiments, des refoulements ou des particules, des plantes, des roches, des montagnes.
Comment alors s’autoriser la vision ? L’expansion de la conscience et la simple volonté de le faire semble être la réponse. La vision se matérialisera lorsque la conscience aura pleinement accepter la grandeur de la situation. On parle ici de découvrir par des mouvements de pensées et concentrations les lois fondamentales de l’univers et donc de la vie. On comprend bien que la conscience doit se préparer à être immense pour intégrer toutes ces informations, ou plutôt accepter d’être immense. Il suffit que je ferme les yeux pour sentir avec vous toutes ces formes, bouger à l’intérieur d’un moi infini.
Peut-on parler d’une vision local? L’idée d’un monde infini peut parfois bloquer, étrangement. Le déploiement des visions plus « locales » sont intéressantes à observer. Regarder la conscience ou la pensée s’orienter vers un domaine. Depuis un point se déplie en une image ou une succession de plans fixes, le corps répond ou construit en envoyant des sensations. Le point de focalisation peut être dans le corps. Le cerveau par exemple. Je m’y oriente par la volonté de ma pensée et son image apparaît, tout simplement, à nouveau accompagnée de sensation. La conscience se déplace dans les différentes zones de l’organe, la perception de l’espace s’en trouve changée
Il apparaît alors que nous pouvons retracer l’origine de vision « spontanée » et en continuer le déploiement. Grâce à ces visions du comportement de notre pensée au quotidien, un contrôle se rend possible dans le développement, à partir du moment ou la forme ou l’événement créé répond à des lois bienveillantes. Par opposition on peut sentir ici que les pensées orientées sur des thématiques de destruction ont un aspect rugueux, brisé, comme une machine dont les engrenages seraient mal montés. La machine boite. Lorsqu’on amène à nouveau la conscience sur une pensée lumineuse comme par exemple un endroit naturel, un plateau recouvert d’une vaste prairie d’herbes hautes en fin de printemps, la brise fait briller l’étendue vert argentée au soleil. À partir de la création de cette image dans l’esprit, et par la volonté d’y introduire l’idée de développement on peut voir apparaitre des formes mouvantes, paisibles et une sensation de calme. Dans cet état de conscience stable, on s’aperçoit que la vision est un organisme vivant. Elle respire. Elle est notre reflet, notre monde, notre intérieur, notre extérieur. La vision, l’image projetée, découvre la structure de construction de ce monde en système optique à base lumineuse. Les images projetées dans notre conscience font structures pour la création de notre quotidien individuel et collectif.
Qu’en est est-il du titre de ces réflexions? Il y avait dans l’impulsion de départ un besoin d’accueillir et d’accepter notre grandeur, individuelle et collective. S’autoriser à voir au-delà du visible. S’autoriser la vision est accepter pleinement nos particularités pour ne pas dire nos différences, nous avons tous des millions de nuances. La majorité des définitions issues de dictionnaire porte en elles une forme d’étroitesse, de jugement. On comprend alors l’inconfort de celui ou celle qui voit au-delà du palpable. On comprend ici comment la conscience collective a pu mettre en marge des esprits brillants tel que Nikola Tesla ou Hilma Af Klint. Chaque être humain agit et travaille à partir de visions, dont la préhension est plus ou moins étendue. Chacun acte à partir de ces images intérieures qui nous guident. La mise en lumière de cet état de fait, l’acceptation par la conscience personnelle puis collective d’un système optique comme base de construction du monde promet de magnifiques journées pour les êtres humains. Chaque jour l’univers grandit et ainsi notre vision avec lui. Prenons juste un instant pour penser.
Merci pour votre présence.
- Premier ajout le 22 juin 2021.
Je viens de lire votre texte « géométrie ». Je vous livre ma première impression, sans recul.
Je suis très heureux de constater l’existance d’une artiste qui – me semble-t-il – utilise la géométrie comme outil de connaissance, de compréhension ou d’approfondissement spirituel. La peinture suit cette compréhension.
Personnellement, j’utilise les formes géométriques pour composer des tableaux en m’appuyant sur la fameuse proportion dorée. J’utilise des connaissances extérieures en espérant qu’elles m’aident à approfondir ma compréhension spirituelle du monde.
Votre démarche est certainement mieux fondée. Merci pour votre partage.
P.S. Peut-être aimeriez-vous vous Emma Kunz
Merci pour votre commentaire.
J’aime utiliser la géométrie de façon plutôt instinctive en suivant les formes que je trouve en méditation.
L’idée de « forme canonique », de proportion idéale, véhiculée par le nombre d’or me semble riche à observer d’un point de vue spirituel. (bien que je ne connaisse pas le sujet en profondeur.)
J’apprécie le travail d’Emma Kunz, merci de me la remémorer ici.
Charline